slezina v Praha

Raja était là assise depuis un moment déjà, la nuit était tombée et un vent frais se levait. Elle fixait la Lune et les étoiles leur confiant alors ses derniers souvenirs...assise à l'envers sur une chaise de jardin rouillé, elle ne savait pas vraiment pourquoi elle était là...
 Soudain une odeur, du vetiver lié à de l'encens, du freesia accompagné de bois de citronnier, puis arriva une odeur de tabac à cigare, appuyé d'un tabac blond anglais. La jeune femme se concentra pour trouver cette odeur d'alcool ambré...
Puis vint la musique, une contrebasse soutenue par un piano, et ces mots en Hébreu:

הלאה, עוד אמשיך ללכת
הלאה, לא אדע לאן
כמה עוד אוסיף לנוע
הלאה יחד עם הזמן.
רוח את גופי עוטפת
אבן לי תהיה סימן
ואני פניי לשמש
שמש עד אשר אשן.
Fermant les yeux, ce fut une autre voix qui se superposa, celle d'un homme, une voix trop aimée, trop connue.

Raja sentie les larmes couler sur ses joues...Comme avait-elle pu en arriver là... reprise par la traduction de l'Hébreu qu'elle avait connue encore :
[...]Do they know how plentiful my memories are here,
How may, so many rise against me?
Sing my bird, wonderous things from a land,
Where spring dwells for ever.Do you bear me greetings from the song of the land,
From the vales, and tops of the mountains?[...]

L'homme à la voix d'or, l'avait retrouvée, l'homme qui avait erré jusqu'au bout du monde pour retrouver sa Terre, il portait alors toute la souffrance de son peuple, et de tous les peuples....
Raja continua à sentir ses larmes couler, dans ce rêve halluciné elle prit une gorgé de l'ambre... celle-ci ou son ombre... l'alcool était de caractère, et réchauffait alors son corps. La voix de velours continuait ses litanies.

La jeune femme s'incarna dans cet autre espace.

Une robe bleue comme la nuit des pieds nus recouverts de bas coutures, des cheveux en bataille et des mains vernies d'un rouge sang. Face à elle, une autre étoffe bleue comme le manteau de la Dame, rehaussée quant à elle d'une chemise argentée, des cheveux sombres en batailles et de longues mains, la droite était posée sur la cuisse qui laissait alors apercevoir la jarretelle de soie bleue-grise.

Le moment était suspendu.

[à Avishai Cohen, une voix dans la nuit]